En à peine 4 ans, l’irlandais s’est imposé comme la star numéro un à l’UFC. Aux termes d’une année 2016 couronnée de succès, sa renommée dépasse maintenant le cadre du MMA. Mais rien n’était gagné d’avance pour le natif de Dublin…
McGregor pulvérise les chiffres du MMA
Qu’est-ce que Conor McGregor a de plus que le reste du monde ? En janvier dernier, il a organisé une séance de questions réponses en direct devant 5 000 spectateurs à Manchester. Même pour la retransmission en streaming, il a réussi à faire débourser environ 5 euros à quelques milliers de fans. Plutôt simple lorsque l’on est suivi par près de 11 millions d’abonnés sur Instagram, 3,5 millions sur Twitter et 5 millions sur Facebook.
En août 2016, il a pulvérisé le record de pay-per-view (paiement à la carte) pour sa revanche contre l’américain Nate Diaz. Plus de 1,65 million de téléspectateurs ont payé pour le voir revenir au plus haut niveau après la 3ème défaite de sa carrière en 24 combats.
A l’UFC, 9 de ses 10 combats ont été récompensés par des « bonus of the night » (prix récompensant le meilleur combat au cours d’une soirée de l’UFC). L’irlandais de 28 ans débarque partout, habillé en fringues de luxe ou torse nu, arborant son tatouage de gorille couronné dévorant un cœur humain. Meilleur trash-talker de notre ère, il a depuis longtemps renvoyé la grande gueule de l’UFC Chael Sonnen dans les cordes.
Le boss de l’UFC, Dana White, a avoué qu’il ne le connaissait même pas avant sa signature. Aujourd’hui, il affirme qu’il s’agit de son meilleur investissement. Pas étonnant, la présence de Conor sur une carte de combats est l’assurance de se remplir les poches. Pour les fans, c’est du divertissement illimité dix jours avant et après son combat.
Qualifié d’arrogant, agressif, vantard… ses détracteurs sont presque aussi nombreux que ses fans. Mais qu’est-ce que l’on sait de lui derrière son image publique ? Les spectateurs ont parfois du mal à distinguer le personnage, censé vendre et provoquer des réactions, à celle de l’humain. A y regarder de plus près, Conor McGregor a tout du sportif modèle qui a tout fait pour réaliser ses rêves.
Du football aux sports de combat
Conor a grandi en banlieue sud de Dublin, à Crumlin, entouré de deux sœurs dans une une famille tout sauf sportive. Sa sœur Erin a fait quelques compétitions de bodybuilding mais hormis cela rien ne prédestinait Conor à se diriger vers une carrière dans le sport. La morosité de Crumlin le pousse à taper le ballon, de temps en temps. Il intègre même le club de foot local.
Dès 12 ans, il tombe dans les sports de combats, en commençant par le kickboxing et la boxe dans un club de quartier. C’est une première révélation.
A la majorité, Conor débute sa carrière par un apprentissage en plomberie, sans grande conviction. Mais dans le même temps, il venait de faire une autre découverte qui changera sa vie : le mixed martial art ou MMA.
« J’ai fait cela un an et ce n’était juste pas pour moi, vous savez. C’est tout ou rien dans ce business. Si tu ne t’entraînes pas deux fois par jour, si tu ne t’y consacres pas totalement, tu ne vas nulle part. »
McGregor venait de découvrir cette discipline en compagnie de son pote Tom Egan, lui aussi futur combattant de l’UFC. En février 2007, il remporte son tout premier combat amateur par KO technique au 1er round. A peine un an après avoir entendu parler de MMA pour la première fois.
Les deux hommes comprennent vite qu’ils n’iront pas bien loin sans se consacrer à 100% au combat. Conor remporte son 1er combat pro par KO au premier round, avant de se faire repérer par son mentor de toujours, John Kavanagh.
Alors entraîneur au SBG Gym de Dublin, il le prend sérieusement sous son aile et le fait progresser comme jamais. Là-bas il bénéficiera également des conseils du célèbre Freddie Roach, entraineur entre autre d’un certain Manny Pacquiao.
Défaite dans les bas-fonds de Dublin
La première défaite a un goût amer. La carrière de l’irlandais est freinée par une violente clé de genou à son 3ème combat pro en 2008. Quand on prend le risque d’arrêter de travailler et de se consacrer à son art, le moindre faux pas peut vous faire regretter. Conor va douter. La graine de champion pense même sérieusement à arrêter.
Qu’espérer après une défaite dans une soirée sans ampleur, arrosée dans un pub minable de banlieue ? Heureusement, sa mère contacte directement son coach et engage un forcing pour ne pas qu’il laisse tomber. Merci maman. Sept ans plus tard je serai millionnaire…
Deux fois double champion
Avant de percer à l’UFC, c’est dans l’organisation européenne du Cage Warriors que McGregor fait des ravages. Mais là encore, il a fallu persister. Sa première apparition se solde par une défaite contre Joseph Duffy, en 2010. C’est encore une défaite par soumission (par étranglement en triangle), la plus humiliante de toute, en seulement 38 secondes. Il en faut plus pour décourager Conor.
Il y retourne en 2011 et met moins de 2 ans pour accrocher deux ceintures autour de sa taille. Il devient célèbre dans toute l’Europe en brandissant les ceintures catégories plumes et légers du Cage Warriors, le meilleur tremplin pour intégrer la Big League.
L’arrivée tonitruante à l’UFC
Il rejoint l’UFC en 2013. A cette époque, le MMA ne lui rapportait presque rien. Il a raconté être aller chercher un chèque de 180 euros de l’assistance sociale pour joindre les deux bouts. Une semaine plus tard, il faisait son premier combat à l’UFC.
Résultat : une victoire par KO en 1 minute contre Marcus Brimage et un chèque de 60 000 dollars de bonus pour le « KO de la soirée ». Plus rien ne sera comme avant après cette soirée du 6 avril 2013. Conor gagnera toujours plus, devenant l’athlète de l’UFC, et plus largement du MMA, le mieux payé de l’histoire.
UFC 205 : l’apogée
Le 12 novembre 2016, le nom de McGregor a pris une nouvelle ampleur. De retour à New York après une longue absence, l’UFC a mis les grands moyens pour faire du Madison Square Garden l’épicentre mondial des sports de combats.
En moins de 2 rounds, il assomme le champion des légers Eddie Alvarez. Il devient alors le premier combattant à détenir deux ceintures de l’UFC en simultané.
Génie ou icône pop en carton ? Être un excellent combattant ne suffit pas toujours. Il faut savoir se vendre, encore plus dans le monde impitoyable du MMA. Qu’est ce qui a fait le succès de Conor McGregor ?
Le trash-talking comme arme de destruction
Tout commence avant le combat. A l’image d’autres champions tels que Muhammad Ali, il a compris que l’aspect psychologique était primordial à ce niveau. Il appelle lui-même cette phase la « guerre psychologique ». Pas étonnant qu’il ait déclaré à la mort de The Greatest : « Personne ne se rapprochera jamais de la grandeur d’Ali ».
McGregor démontre une répartie incroyable quand il s’agit d’attaquer verbalement ses opposants. Celui qui a le malheur de tenter de le provoquer se jette littéralement dans la gueule du loup. Comme ce pauvre Jeremy Stephens, qu’il a remis en place avec le désormais célèbre : « Who the fuck is that guy ? » (Mais putain qui est ce mec ?). Il a osé le provoquer pendant une conférence de presse. Cette punchline lui colle maintenant à la peau.
Après sa victoire à l’UFC 205, il a lâché devant des millions de téléspectateurs :
« J’ai passé tout mon temps à arracher tout le monde, j’ai ridiculisé tout le monde dans le roster, j’aimerais prendre du temps pour présenter des excuses à………. absolument personne. Un double champion fait ce qu’il veut putain ! Mon rêve est devenu réalité ! »
Conor passerait pour une vulgaire bête de foire si ses paroles n’étaient pas suivies d’actes. Lorsqu’il annonce quelque chose, il a le culot de le réaliser avec la manière. Il a prédit ses victoires par KO au 1er round sur Diego Brandao et sur Eddie Alvarez, son KO sur Dustin Poirier sur un jab, celui de Chad Mendes en 2 rounds… Bref, il l’ouvre en grand mais il assure derrière.
Le guerrier celtique
En affichant toujours les couleurs irlandaises, il flatte le patriotisme irlandais avec brio. La diaspora irlandaise, très présente aux Etats-Unis, ne demandait pas mieux.
Ses deux combats contre Nate Diaz : une défaite et un retour gagnant, ont été parfaits pour asseoir sa légende. L’icône doit être battable, sinon on est détesté de tous comme un certain Mayweather…
Sa fan base d’irlandais buveurs de bières raffole de l’image du guerrier qui renait de ses cendres. Conor n’en loupe pas une pour les caresser dans le sens du poil.
Un style inimitable
Il y a un redoutable combattant derrière l’image arrogante. McGrgeor est avant tout un striker : combattant debout. Il est gaucher mais capable de changer pour perturber l’adversaire.
Son style est basé sur la boxe, ses victoires étant pour la majorité d’entre elles le fruit de ses poings. Son arme suprême est peut-être ce pas de retrait suivi (ou simultané) de sa main gauche en contre. Les adversaires viennent s’empaler dessus comme de vulgaires débutants.
« Precision beats power, timing beats speed. »
Désormais célèbre, cette citation résume à elle seule le style de l’irlandais : « la précision l’emporte sur la puissance, le timing l’emporte sur la vitesse. »
Il a lâché cette punchline juste après avoir battu le champion Jose Aldo par KO en 13 secondes. Le brésilien était alors invaincu à l’UFC et avait enchaîné 18 victoires dans la cage…
Un homme fidèle et travailleur
Contrairement aux apparences, McGregor est un acharné de travail qui n’hésite pas à se remettre en question ou aller chercher des techniques d’entraînement innovantes.
Il n’hésite pas à s’inspirer de ceux qui l’ont battu. Diaz est réputé pour la qualité de son cardio (endurance) et pratique le triathlon, le vélo et de longues sessions d’entraînement. Avant l’UFC 202, Conor s’est employé à radicalement progresser dans ce domaine. Il a basé une grande partie de son entraînement sur la pratique du vélo pour gagner en endurance. Résultat : retour gagnant par décision contre le même homme.
Au sein du SBG Ireland, il a son propre coach de mouvement, Ido Portal. Ce dernier théorise le concept de mouvement dans l’espace en allant chercher dans le yoga, la danse, les arts martiaux. Cette quête de perfection donnerait à McGregor un avantage au niveau des déplacements, plus fluides et imprévisibles.
Côté cœur, il vit avec Dee Delin depuis 2008. Rencontrée dans une boîte de nuit, elle est maintenant la femme de sa vie, même s’ils ne sont pas mariés. Elle a toujours été sa première fan, persuadée qu’il deviendra une grande star. Après avoir remporté le titre des légers à l’UFC 205, McGregor a annoncé qu’il prendrait un congé pour la naissance de son premier enfant.
McGregor l’humain n’a rien à voir avec son personnage. Il trimballe avec lui un chapeau que son grand-père portait avant de mourir. Ses premières primes en poche, il a tout fait pour que son père prenne une retraite anticipée.
Jose Aldo, son ennemi juré, le décrit même comme « un mec normal, plutôt amical, mais qui se transforme dès qu’il y a des caméras ».
Un combat contre Mayweather en juin prochain ?
Un combat contre la star invaincue de la boxe Floyd Mayweather déchaîne les passions. Pas un mois ne se passe sans qu’une nouvelle rumeur ne vienne relancer la machine. Le 30 novembre 2016, McGregor a obtenu une licence de boxe professionnelle de la California Athletic Commission. Plus récemment, les deux combattants n’ont cessé de se provoquer sur les réseaux sociaux.
Les premières tentatives ont toutes été avortées pour des raisons financières ou par le boss de l’UFC Dana White. Le contrat exclusif de McGregor avec l’organisation était un obstacle de taille.
Mais le vendredi 17 mars, White a déclaré ne pas être hostile à la tenue de ce combat. Il a même ajouté pendant l’émission Conan : « Il y a tellement d’argent en jeu que je ne vois pas comment cela pourrait ne pas avoir lieu. »
L’enceinte du T-Mobile Arena à Las Vegas aurait déjà été réservée pour l’événnement à la date du 10 juin. Reste à négocier le coeur du sujet : la retransmission en pay-per-view et surtout : le partage des gains.
S’il pose de vraies questions de légitimités sportives, ce combat pourrait être le plus suivi de l’Histoire et, forcément, le plus lucratif.
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Jusqu’où ira Conor McGregor ?
L’ascension fulgurante de McGregor s’explique assez facilement mais soulève tout de même une question. Que restera-t-il de lui dans 10 ans, 20 ans, ou plus ?
Sur ses 24 combats professionnels, seulement dix ont été de niveau mondial. En boxe anglaise, les combattants stars affichent entre 50 et 100 combats avec un pourcentage de Kos proche de 80%. La célébrité arrivait sans l’aide des réseaux sociaux. McGregor est excellent mais attendons encore un peu avant d’en faire une légende.