Mafieux, braqueurs, tireurs… il y en a pour tous les goûts…
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Mais qu’est ce qui fait un bon gangster de cinéma ? Le charisme ? La gueule de l’emploi ? Le grain de folie niché aux fonds des yeux ? La dégaine ? Des faits d’armes vaguement inspirés du réel ?
Si la réponse se situe à l’évidence quelque part au milieu de cet inventaire à la Prévert, une fois la lecture de la liste ci-dessous terminée, vous devriez avoir une idée plus précise sur la question.
PS : choix a été fait de ne retenir un seul gangster par film et de seulement se concentrer sur les films US
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20. Vincenzo Coccotti
Interprété par Christopher Walken dans True Romance (1993).
Consigliere du chef mafieux ‘Blue’ Lou Boyle, si « Don Vincenzo » n’apparaît en tout et pour tout que dans une seule scène, et qui plus est en se montrant économe sur son temps de parole, il ne lui en faut néanmoins pas plus pour marquer les esprits.
À sa décharge, il ne s’agit pas de n’importe quelle scène : écrite par un jeune Quentin Tarantino, celle qui est surnommée la « Sicilian Scene » est de son propre aveu sa préférée de toute sa filmographie.
Tiré à quatre épingles, celui qui se présente comme « l’antéchrist » écoute ainsi patiemment Dennis Hopper lui expliquer que du sang noir coule dans ses veines avant de lui coller plusieurs balles dans le citron sous le coup de la colère, lui qui pourtant n’avait « tué personne depuis 1984 ».
19. Al Capone
Interprété par Robert De Niro dans Les Incorruptibles (1987).
Initialement ce devait être le regretté Bob Hoskins qui était censé prêter ses traits au gangster le plus célèbre de l’Amérique. Enfin ça c’était avant que le réalisateur Brian de Palma n’arrive à convaincre l’acteur favori de Martin Scorsese de rejoindre l’aventure.
Ni une, ni deux, Bobby D. s’en est allé en Italie prendre une bonne douzaine de kilos en mangeant des pâtes, s’est rasé le crane, a retrouvé les tailleurs encore en vie qui confectionnaient les costumes de Capone, tout ça pour au final piquer la vedette à l’intégralité du casting (Sean Connery excepté).
Bon après il est toujours possible de finasser en disant que le portrait fait ici du roi de la prohibition est un peu trop romancé, mais ne soyons pas grincheux.
18. Nino Brown
Interprété par Wesley Snipes dans New Jack City (1991).
Grand patron de la cité Carter, le chef de file des Cash Money Brothers (oui Lil Wayne a clairement vu et revu le film) gère d’une main de fer le trafic de crack dans les bas-fonds newyorkais.
Fort d’un sens du style à la croisée des chemins entre celui des révolutionnaires Black Panthers et celui des gangstas rappeurs de sa ville, il n’oublie pas de se faire plaisir à l’occasion, entre petite partie de streetball sur un terrain customisé aux couleurs de son gang, saut à la corde en pleine réunion de crise et adultère avec la go sûre de son bras droit.
Bref, « la vie de rêve » pour reprendre les mots célèbres d’un autre.
17. Frank Lucas
Interprété par Denzel Washington dans American Gangster (2007).
Voilà un type inconnu au bataillon, qui en pleine guerre du Vietnam met sur pied un trafic d’héroïne d’un genre nouveau en important au nez et à la barbe de la mafia italienne un produit d’une qualité inédite, et qui une fois au sommet, shoote Idris Elba en plein jour s’empresse de mettre les siens l’abri, non sans oublier d’épouser l’une des meufs les plus désirables du New York City des années 70.
Bien que corporate jusqu’au bout des ongles, Lucas rate cependant sa reconversion, lui qui aurait mieux fait d’intégrer le comité de direction d’une entreprise cotée au Dow Jones quand il en était encore temps plutôt que d’avoir à balancer aux bleus tous les noms de son répertoire pour sauver sa peau.
N’est pas Jay Z qui veut.
16. Frank Costello
Interprété par Jack Nicholson dans The Departed (2006).
Inspiré du très réel Whitney Bulger qui dans le Boston des années 80/90 s’est joué de la pègre et des autorités en faisant croire à chacun qu’il roulait pour eux, l’irlandais Francis Costello aime tellement vivre cette vie que malgré ses 70 ans et un compte en banque généreusement garni, il continue de se foutre du monde – genre refourguer à prix d’or des prises électriques au gouvernement chinois en les faisant passer pour des microprocesseurs haute technologie.
Pas spécialement porté sur la sobriété (le mec déambule chez lui en peignoir léopard et mange du homard au petit déj’), ses punchlines valent leur pesant de cacahuètes Cf. son « I don’t want to be a product of my environment. I want my environment to be a product of me » qui ouvre les débat avec en fond Gimme Shelter des Rolling Stones.
15. Mr. Blonde
Interprété par Michael Madsen dans Reservoir Dogs (1992).
Haut la main le plus psychopathe de tous les dogs, mais aussi et surtout le plus cool – voir même le personnage plus cool de tout le Tarantino Universe si l’on en croit ce classement.
En mesure d’apprécier les petits plaisirs de la vie quel que soit le contexte (ici se délecter d’un milkshake suite à un braquage de bijouterie qui vient de tourner au bain de sang, là exécuter quelques pas de danse sur Stuck in the Middle With You des Stealer’s Wheel tout en torturant au rasoir un agent des forces de l’ordre), le frangin de Vincent Vega ne se départit jamais de son charisme ancienne école à la Robert Mitchum.
De quoi regretter toujours un peu plus que ne se soient jamais concrétisés les projets de prequel/sequel dont il a un temps fait l’objet…
14. Benjamin ‘Busgy’ Siegel
Interprété par Warren Beatty dans Bugsy (1991).
L’homme qui un jour rétorqua au premier degré à son ami le comédien George Raft tentant de le prévenir qu’aucune femme au monde ne vaut de se prendre une balle entre les yeux : « Tout dépend des yeux, tout dépend de la femme ».
Créateur selon la légende de ce paradis du vice qu’est Las Vegas, Benjamin Siegel incarne à la perfection la figure du gangster de cinéma hollywoodien, que ce soit par sa démesure, son romantisme ou le tragique de sa destinée.
Ajoutez également à cela qu’il porte le costume croisé comme personne, et c’est à se demander si dans une réalité alternative il n’a pas été la plus grande star de cinéma de son époque.
13. David ‘Noodles’ Aaronson
Interprété adolescent par Tiler Scott et adulte par Robert De Niro dans Il était une fois en Amérique (1984).
Candidat au titre de film le plus mélancolique de l’histoire du septième art, C’era una volta in America de Sergio Leone vagabonde pendant près de quatre heures dans la mémoire tumultueuse de ‘Noodles’, un gangster juif du Lower East Side.
Dévoré par le remord après avoir trahi ses amis 35 ans plus tôt, au soir de sa vie il lui est impossible de regarder le présent autrement que les yeux rivés vers le passé.
L’enfance, les illusions, le temps qui passe… il se laisse aller à réinterpréter les événements à la manière d’une fable, le tout rythmé par les notes du monument Ennio Morricone (paix à son âme).
C’est lent, c’est beau, et c’est émouvant du début à la fin.
12. Vincent
Interprété par Tom Cruise dans Collateral (2004).
Si vous cherchiez le meilleur rôle de Tom Cruise, n’en déplaise aux fans de Les Grossman dans Tropic Thunder, ne cherchez plus.
Tueur à gage au service d’un cartel colombien, tel un Terminator il parcourt Los Angeles la nuit pour abattre une à une ses cibles. Costume argenté assorti au poivre et sel de ses cheveux, il s’entiche d’un chauffeur de taxi velléitaire (Jamie Foxx) à qui il dispense quelques solides leçons de vie où sont cités pêle-mêle Darwin, Shakespeare, Mile Davis et le Yi Jing.
« Indifférent » à la vie ou à la mort, il masque derrière son professionnalisme un cynisme à toute épreuve avant de rendre les armes façon Mim au royaume d’Asgard.
11. Lefty Ruggiero
Interprété par Al Pacino dans Donnie Brasco (1997).
Petite main de la famille Bonanno, ce perdant tout sauf magnifique a beau être l’affranchi le plus poissard du crime organisé, cela ne l’empêche pas d’être à bien des égards le plus touchant.
Son regard fatigué constamment à la recherche d’un signe de validation, ses bravaches de comptoir mille fois répétées écoutées d’une oreille, ses tentatives maladroites de jouer au mentor avec Donnie faute d’avoir su être un père pour son fils… Lefty c’est le type laborieux qui essaye du mieux qu’il peut sans jamais vraiment y arriver.
Lefty c’est aussi ce type qui s’est porté garant de la plus grande taupe jamais introduite au cœur de la mafia newyorkaise.
Pas dit qu’il méritait complètement ce sort.
10. Jules Winnfield
Interprété par Samuel L. Jackson dans Pulp Fiction (1994).
Vincent Vega, Marsellus Wallace, Butch, Winston Wolf… ce ne sont pas les crapules de qualité qui manquent dans le second métrage de Tarantino. L’ami Jules peut toutefois se targuer d’être celui pour qui l’intrigue a été montée dans le désordre afin de conclure sur son arc narratif.
Touché par la lumière divine en plein taf, cet authentique amateur d’hamburgers (et de massages de pieds) a en effet accomplit un virage à 180 degrés, passant ainsi du très cool Fonzie de Happy Days au très spirituel Cain dans Kung Fu.
Comme quoi il n’est pas toujours nécessaire de sortir les canons sciés pour donner dans le spectaculaire.
9. Neil McCauley
Interprété par Robert De Niro dans Heat (1995).
Plutôt du genre cérébral, pour ne pas dire obsessionnel, il planifie les coups de son gang comme un joueur d’échecs.
Chevaleresque dans un milieu qui tient du panier de crabes, malgré un Vincent Hanna/Al Pacino qui ne démérite pas à ses trousses, c’est lui que le public et les professionnels de la profession soutiennent de bout en bout.
Maître de ses émotions tout au long du film, c’est paradoxalement en enfreignant sa principale règle de conduite, celle des 30 secondes (« Don’t let yourself get attached to anything you are not willing to walk out on in 30 seconds flat if you feel the heat around the corner », la citation en VO permet de comprendre le titre du film), qu’il chute.
8. Frank White
Interprété par Christopher Walken dans The King of New York (1990).
De retour dans les rues de la Grosse Pomme après une longue peine, il renoue avec son crew pour reprendre la place qui est la sienne au sommet de la pyramide du crime.
Triades, colombiens, italiens… tous ceux qui selon ses critères méritent d’y passer y passent.
Car oui, du haut de la suite qu’il occupe dans l’un des plus prestigieux palaces de la ville, Frank White ambitionne cette fois de faire les choses différemment : il compte se servir de l’argent du deal pour sauver un hôpital des quartiers pauvres.
Sans grande surprise, cette quête de rédemption qui ne dit pas son nom s’effondrera tel un château de cartes.
7. Carlito Brigante
Interprété par Al Pacino dans L’Impasse (1993).
Libéré miraculeusement de prison après cinq ans alors qu’il en avait pris pour trente, cet ex-baron de la drogue met à profit cette seconde chance pour revenir dans le droit chemin.
Son rêve ? Partir ouvrir une société de location de voitures sur Paradise Island, une île des Bahamas.
Résolu à dégoter les 75 000 dollars qui lui manquent en toute légalité, il louvoie du mieux qu’il peut entre vielles connaissances et amis pas toujours bien intentionnés pour garder la tête hors de l’eau.
Sauf que l’on n’échappe pas à son milieu d’un coup de baguette magique, d’autant plus quand en son sein « un service peut tuer plus vite qu’une balle ».
6. Nicky Santoro
Interprété par Joe Pesci dans Casino (1995).
« T’attaques Nicky à coups de poings, il sort une batte de baseball. Tu l’attaques au couteau, il sort un flingue. Et si tu sors un flingue, t’as intérêt à le tuer parce qu’il va revenir à la charge jusqu’à ce qu’il y en ait un des deux qui soit mort. »
Ça c’est ce que dit Sam Rothstein de son ami d’enfance quelques secondes après qu’il ait troué la gorge d’un homme à coups de stylo à plume pour un motif des plus futiles.
Plus tard dans le film il serrera si fort la tête d’un rival dans étau au point de lui éjecter un œil du globe oculaire, puis ira mitrailler les domiciles des flics.
Oui, Nicky est un vrai gangster.
5. Keyser Söze
Interprété par Kevin Spacey dans Usual Suspects (1995).
La légende veut qu’il ait choisi de tuer sa femme et ses enfants plutôt que de céder la moindre parcelle de son territoire à ses ennemis, qu’il est allé ensuite brûler leurs maisons, les maisons de leurs familles et les maisons de ceux qui leur devaient l’argent.
La légende veut aussi qu’après ce fait de gloire il ne se soit plus jamais réapparu en public. Érigé en mythe, sa réputation effraye jusqu’aux gangsters eux-mêmes.
Impossible du coup de soupçonner pendant l’heure 45 que dure le film qu’il est venu se jouer une toute dernière fois des autorités juste sous leur nez sous l’identité du boiteux Roger ‘Verbal’ Kint.
Ou pour le citer le poème Joueur généreux de Charles Baudelaire : « La plus belle des ruses du diable est de vous persuader qu’il n’existe pas. »
4. Tony Montana
Interprété par Al Pacino dans Scarface (1983).
Cowboy mégalomane cocaïné jusqu’à la moelle, le plus célèbre des réfugiés politiques cubains incarne depuis 1983 la figure ultime du self made man.
Et tant pis si d’après le scénariste Oliver Stone il est n’est qu’un type « sans éducation », qu’il roule en Cadillac à sièges léopards, porte des chemises noires avec ses costumes blancs ou enchaîne un tigre dans son jardin, Tony M. inspire l’envie d’avoir envie.
Libre ensuite à chacun de transposer son exemple dans le domaine de son choix, le trafic de yayo tendant irrémédiablement à broyer ses élèves les plus appliqués – lire : tomber seul les bras en croix au fond d’un bassin, le corps criblé de balles.
3. Henry Hill
Interprété adolescent par Christopher Serrone et adulte par Ray Liotta dans Les Affranchis (1989).
Aussi loin qu’il s’en souvienne, il a toujours voulu être un gangster.
Joie de la voix off, à l’écouter détailler généreusement aux spectateurs les us et coutumes de son crew pendant toute la première partie du film, on comprend pourquoi : il se lève quand il veut, ne fait pas la queue au restaurant et trompe même ses maîtresses.
Et puis chemin faisant, au fur et à mesure que le folklore passe au second plan au détriment d’une réalité des choses beaucoup plus crue (ses potes qui dégainent pour un oui ou pour un non, sa dépendance à la poudre blanche…), on comprend pourquoi grâce au jeu tout en fébrilité de Ray Liotta que rien de tout cela ne pouvait bien se finir.
2. Michael Corleone
Interprété par Al Pacino dans Le Parrain I (1970), Le Parrain II (1974) et Le Parrain III (1989).
Fils prodigue farouchement décidé à rester dans le droit chemin, il est inexorablement rattrapé par le destin quand suite à la tentative d’assassinat dont a été victime son père, le pouvoir au sein de la Famille est laissé vacant.
Prince devenu roi, il se laisse consumer de part en part par le mal pour se muer en être aussi froid que calculateur capable des pires atrocités – comme lorsqu’il accepte de devenir le parrain de l’enfant de sa sœur Connie dans le seul but de supprimer son mari Carlo, ou lorsqu’il fait tuer son frère Fredo.
Se sachant « au-delà de toute rédemption », son ultime tentative pour sauver son âme dans le troisième acte ne fait cependant qu’empirer les choses.
Michael Corleone ou la tragédie grecque à son meilleur.
1. Don Corleone
Interprété par Marlon Brando dans Le Parrain (1972).
Sérieusement, ne serait-ce qu’à la lecture du titre de ce classement, existait-il le moindre doute quant à l’octroi de la première place ?
Iconique dès sa première scène où chat entre les mains il dicte de sa voix d’outre-tombe sa conception du bien et du mal dans un monde où il s’est arrogé le droit de vie ou de mort sur ses congénères, ce monarque sur le point de passer le pouvoir a figé l’image du mafieux dans l’imaginaire collectif.
Mieux : ravis de ce portrait pour le moins flatteur, à la sortie du Parrain les membres de Cosa Nostra se sont mis à singer les rituels et expressions mis en scène dans le film (appeler un boss « Don », baiser ses mains, porter une boutonnière rouge à la poitrine…).
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