Parmi les 13 cas présentés, certains ont du longtemps s’en mordre les doigts…
Certes « choisir, c’est renoncer » comme le disait l’autre (aka André Gide), mais quand même. Si le débat sur la prédominance de l’instru ou des lyrics fait rage depuis la préhistoire du rap, il est toujours plus facile de conquérir le monde avec Dre ou Timbaland aux consoles plutôt qu’en tapant la mesure dans ses mains.
Bon attention le beat ne fait pas tout non plus et rapper ne se limite pas à parler derrière un micro. Les exemples d’artistes qui ont utilisé le même sample pour un résultat mille fois différent sont légions, et ce qu’accomplissent les maîtres du flow n’est absolument pas reproductible sans talent.
Voici donc 13 artistes (dont quelques chanteurs Rnb, commencez pas à troller hein) qui auraient (peut-être) pu voir le cours de leurs carrières changé du tout au tout… #ShouldaWouldaCoulda
« In Da Club » a été refusé par… D12
Après avoir collaboré à quatre reprises avec Dr Dre sur leur premier album Devil’s Night sorti en 2001, le collectif de Detroit s’est vu proposé en exclu cette instru à la ligne de basse addictive en diable (dont on murmure qu’elle a été composée en réalité par Scott Storch ou Mike Elizondo).
Alors que les potos d’Eminem n’arrivaient pas à trouver la bonne approche pour attaquer le beat, Fiddy qui venait juste de signer sur Shady/Aftermath n’aura pas cette hésitation. Il trouvera là le hit qui le propulsera à des hauteurs encore jamais atteintes.
Questions : Get Rich Or Die Tryin’ aurait-il connu le même succès sans ce single ? Refrain reconnaissable entre mille, gimmick imparable (« Go, shawty / It’s your birthday »)… comment imaginer les Dirty Dozen faire aussi bien que 50 ?
« See You Again » a été refusé par… 50 Cent & Eminem
L’un des gros hits de la décennie (premier clip rap à franchir la barre du milliard de vues, numéro 1 dans une douzaine de pays, record d’écoutes sur Spotify en une journée…) a d’abord été proposé aux deux superstars. Déjà engagé sur la bande originale de Southpaw, Em’ a dû décliné l’offre.
Et oui en lieu et place de cette soupe à la guimauve et ses « Oo-oo-OOH-oo-OOH » exaspérants au possible, on aurait pu avoir droit a du vrai bon rap mainstream associant les talents de conteur d’Em’ à un refrain de Fiddy… (soupir)
Questions : 50 aurait-il connu les affres de la banqueroute avec un tel succès ? Qui se souviendra de Charlie Puth dans 2 ans ?
« Rock Your Body » a été refusé par… Michael Jackson
Au début des années 2000, les Neptunes de Pharrell sont allés démarcher le King of Pop alors en pleine préparation de son album Invincible. Heureusement pour JT, MJ n’a pas été emballé.
Tandis que son premier solo Justified démarrait mollement dans les charts, ce titre calibré pour les clubs combiné au très emo Cry Me A River offre une crédibilité musicale nouvelle à l’ancien NSync et le fait exploser sur la scène internationale.
Symboliquement on pourrait presque voir un passage de témoin.
Questions : Michael Jackson a-t-il refusé ce beat car il sonnait vraiment trop Michael Jackson ? Qui sont ces gens qui ne bougent pas la tête dès les premières mesures du morceau ?
« Find Your Love » a été composé initialement pour… Rihanna
Ce single midtempo certifié Platine aurait fait partie des chutes de l’album 808s & Heartbreak de Kanye West. Remanié par les producteurs No I.D et Jeff Bhasker il a été proposé à la chanteuse qui ne donnera pas suite.
Drake s’empare alors du thème en ajoutant sa touche aux paroles, clamant haut et fort son désir de trouver une relation durable plutôt que d’être considéré comme un simple flirt.
Question : Alors qu’il venait de se faire lourder par Riri, Drizzy n’a-t-il pas pensé très fort à elle en interprétant cette chanson ?
« Oh Boy » a été refusé par… Memphis Bleek
En 2002, fraîchement signé sur le label de Jay Z et Dame Dash, Cam’ron profite de ce désistement pour faire de cette prod’ d’un Just Blaze alors au sommet de son art le premier extrait de son album Come Home With Me.
Oh Boy se classe quatrième du Billboard et impose définitivement le crew des Diplomats sur la scène rap. Cerise sur le gâteau, quelques mois plus tard Mariah Carey enregistrera sa propre version intitulée Boy (I Need You) avec Killa en featuring.
Questions : le second couteau le plus fidèle de Roc-A-Fella aurait-il trouvé là de quoi se départir de son image de second couteau le plus fidèle de Roc-A-Fella ? La rime Santana/bandana est-elle la plus prévisible du monde ?
Nas a posé le premier sur… « Many Men »
Morceau des plus emblématiques du carton Get Rich or Die Tryin’, Many Men a non seulement été proposé à Esco en premier, mais ce dernier a en plus commencé à écrire et rapper dessus avant de se raviser et de l’exclure de la tracklist de son album God’s Son.
Il laisse alors le beat filer chez un autre artiste signé chez Columbia : 50 Cent. Une réaction qui de quoi étonner puisque les deux hommes étaient à l’époque en guéguerre, Nas ayant plus ou moins piqué à Fiddy sa place sur le single I’m Gonna Be Alright de Jennifer Lopez.
Dans un genre pas si éloigné, notez également que Nas a également fait l’impasse sur le You Don’t Know My Name de Kanye West qui finira dans les mains d’Alicia keys.
Questions : Critiqué tout au long de sa carrière pour ses choix d’instru, Nas ne tend-il pas le bâton pour se faire battre ? God’s Son est-il passé à deux singles du vrai gros succès ?
« Jump Around » a été refusé par… Ice Cube
Beatmaker de Cypress Hill mais pas que (les Beastie Boys, KRS One, GZA…), DJ Muggs compose au début des années 90 une instru aussi hurlante qu’énergique qu’il s’en va proposer à son réseaux de potes rappeurs, dont le Cube Glacé.
Tandis qu’aucun ne s’est montré franchement enthousiaste, il s’en va démarcher un peu en dernier recours le groupe House of Pain. Frappé par un éclair de génie, Everlast et sa bande concoctent alors le plus irlandais des bangers de l’histoire du hip hop.
Questions : En cas de clip, l’ex NWA aurait-il échangé son jersey des Los Angeles Lakers pour celui des Boston Celtics ? Devant le succès du moreau auprès de la classe moyenne blanche, aurait-il continué d’écrire « America », « AmeriKKKa » ?
« Nothin’ On You » et « Airplanes » étaient destinées à… Lupe Fiasco
Il fût un temps où B.O.B. et Lupe Fiasco étaient tous deux considérés comme les futurs grands espoirs du rap US mainstream (oui c’était il y a longtemps). Avantage au premier qui a eu le nez creux en s’arrogeant ces deux singles qui culminent à plusieurs centaines de millions de vues chacun.
Lupe peut l’avoir mauvaise sur ce coup (non, nous ne ferons pas un jeu de mots avec son patronyme) d’autant plus qu’il avait enregistré avant le rappeur d’Atlanta ses propres versions – cliquez ici et là.
Question : quelles versions de Nothin’ On You et de Airplanes préférez-vous ?
« Gold Digger » a été refusé par… Shawnna
Mais si Shawnna la rappeuse signée par Ludacris sur feu son label Disturbing Tha Peace…
En 2004 Ye’ se retrouve en studio avec elle pour bosser son Worth tha Weight. Si le disque comporte effectivement la patte de Kanye (le track What Can I Do), on dirait bien que la rappeuse n’a pas choisi la bonne prod’. On peut comprendre d’ailleurs elle ait eu quelques réticentes quant à rapper à la face du monde : « I ain’t saying I’m a gold digger/But I ain’t messing with no broke nigga ».
Ye’ va alors réadapter le morceau selon une perspective masculine et appeler Jamie Foxxx en renfort. Le reste appartient à l’histoire.
Questions : Shawnna n’aurait-elle pas pu gratter un couplet en featuring ou même une place sur un quelconque remix ? Ludacris est-il le pire patron de label de la planète ?
« Happy » était destiné à… Cee-Lo Green
Pharrell a admis en interview qu’il avait composé ce titre sans avoir dans l’idée d’en être l’interprète. C’est en effet la moitié des Gnarls Barkley qui devait en assurer la partie chantée.
Ni une, ni deux, Cee-Lo a rapidement enregistré sa version de cet hymne à la joyeuseté. Ne partageant guère son enthousiasme, son label va refuser d’en faire un single. Oups.
Questions : les gens qui ont pris cette décision ont-ils retrouvé du travail depuis ? Lebron James et Diddy auraient-ils osé porter le même chapeau que Pharrell sans ce succès planétaire ?
« Fuckin’ Problems » a été refusé… et par Drake, et par Kendrick Lamar
En train de plancher sur un album posthume d’Aaliyah, Drake enregistre en duo avec 2 Chainz ce titre qu’il conçoit comme une réponse à tous ceux qui l’accusent d’être un peu trop « soft ».
Il propose ensuite à K.Dot de l’ajouter à la tracklist de good kid, m.A.A.d city. Si ce denier décline l’offre pour une question de cohésion, il y va néanmoins au passage de son couplet.
À la recherche du single qui lui permettra de faire décoller les ventes de son très attendu premier album Long. Live. A$AP, A$AP Rocky ne s’embarasse pas lui de tant de pudeurs. Bien lui en a pris, il s’agit à ce jour de son plus gros hit.
Questions : Kendrick Lamar savait-il que lorsque Drake évoque « tous ceux qui l’accusent d’être un peu trop « soft », il parlait notamment de lui ? A$AP Rocky n’a-t-il pas un peu trop joué la facilité sur ce coup ?
« Candy Shop » a été refusé par… Fat Joe
« Il arrive que tu saches qu’un beat n’est pas fait pour toi » a déclaré le Gros Joseph après avoir décidé de passer sur cette nouvelle instru coproduite selon ses dires avec Scott Storch.
Convaincu de détenir là un hit en puissance digne de leur Lean Back de l’été 2004, Storch va harceler le rappeur au téléphone lorsqu’il apprend que 50 Cent est également intéressé. Beau joueur, Fat Joe lui rétorque n’avoir « aucun problème avec ce mec » et ne voit pas d’inconvénient à ce que Fiddy pose à sa place.
Question : Joe aurait-il été si fair-play s’il avait su que Curtis allait enregistrer quelques semaines plus tard l’incendiaire Piggy Bank sur lequel il l’attaque frontalement ?
« Niggas in Paris » a été refusé par… Pusha T
Cette production de Hit-Boy n’a pas réussi à trouver grâce aux oreilles de Pusha T : « on dirait une musique de jeux vidéo ».
Le Clipse ne regrette pour autant pas son choix. De son propre aveu il n’aurait pas réussi à transcender le beat, contrairement à Ye’ et Jay qui en ont fait l’hymne étendard de leur album commun Watch The Throne.
Questions : « What’s Gucci, my nigga? What’s Louis, my killa? What’s drugs, my dealer? What’s that jacket, Margiela? »
On se quitte avec cette séance studio extraite du documentaire Fade to Black intéressante à plus d’un titre.
Déjà parce qu’on voit Timbaland boire du jus dans un bidon (oui, dans un bidon) et manger une banane magique, mais aussi et surtout parce qu’on le voit proposer ses beats inédits à Jay Z. Ce dernier opte pour le monstrueux Dirt Off Your Shoulder et laisse filer sans sourciller The Potion de Ludacris et Come As You Are de Brandy.