Plongée dans un monde à la croisée du fitness, de la mode et de l’escorting…
Les cainris les appellent les « Instagram hoes ». Ça sonne bien même si c’est quand même pas très sympa.
Il est vrai que leur réseau social préféré se confond allègrement avec la bande-annonce ininterrompue d’un « lifestyle » aussi authentique que les courbes d’une Kardashian et qu’à défaut d’exhiber le moindre talent, elles postent des cascades de clichés retouchés qui respirent à fond le culte de soi et la superficialité.
Toujours est-il qu’excepté s’adonner corps et âme à la course aux abonnés, personne n’a encore vraiment compris comment ces filles occupaient leurs journées.
Gloire doit cependant être rendue à toutes les Ashley, Chantel et Angelica de la terre d’œuvrer chaque jour pour faire d’Instagram un endroit plus sexy… car oui malgré tous leurs côtés insupportables, les cœurs continueront de pleuvoir sur les profils de ces filles de moove du siècle 21.
Et pour cause, leur succès auprès des propriétaires hétérosexuels de smartphones procède d’un communty managment qui relève tout autant de l’art que de la science.
Le voici décrypté en 7 commandements.
1. Poster 50% de selfies
La base.
Et très pratique pour proposer de l’attrape-like à moindre coût en attendant la prochaine soirée tous frais payés ou de se faire inviter en vacances par un type plus riche que soi.
Avis aux non-initiés qui pourraient ne voir là qu’une collection de photos hommages à Daffy Duck ou des imitations de poisson morts, ne vous méprenez-pas : l’art du selfie ne se limite pas à remplir ses lèvres de collagène ou à avoir l’air de s’être fait déféquer de la gouache sur le visage par un pigeon.
La discipline obéit en effet à toute une série de figures imposées (cheveux mouillés, sans maquillage, seule dans son lit, miroir d’hôtel de luxe, tirage de langue…) et exige que soit retiré dans les 24 heures tout cliché qui n’aurait pas atteint son quota d’interactions.
2. Capitaliser sur son boul’
La taille de leur derrière étant l’atout majeur du curriculum vitae de toute fille du moove qui se respecte, il ne s’agit pas de lésiner sur les moyens question autopromotion.
Dans cette course à celle qui fera le plus chuter ses reins, deux armes de destruction massive ont fait leur preuve : la pose dite du flamant rose et le yoga pant, qui partage ceci de commun avec les enfants et les alcooliques c’est qu’il ne ment pas.
Toute la subtilité consiste ici à racoler au max’ sans déchaîner les foudres de la censure, ou comble de l’infamie, se faire accuser d’avoir photoshopé ses photos !
3. Faire plein de trucs une seule fois
Exposition d’art contemporain, cours de boxe, lecture… sur le ‘Gram le faire-savoir importe plus que le savoir-faire.
Prenons le yoga. Si tenir trois ou quatre positions est absolument insuffisant pour être digne de Dhalsim, sur le net cela suffit largement à la fille IG pour se montrer à échéances régulières en leggings bariolés et sneakers fluo.
Autre exemple, âme de groupie oblige : les concerts, lieux privilégiés pour aller pavaner sa moue boudeuse. Et tant pis si l’artiste en question leur était encore inconnue avant qu’elle ne découvre son nombre d’abonnés, une pose photo lascive à l’enthousiasme à peine surjoué viendra gommer tout ça.
4. Maîtriser l’art du statut cryptique
Toute vérité n’étant pas forcément bonne à écrire, mieux vaut opter pour un « Si la vie é un jeu alor joues et profite de chak instan comme si cété lé dernier » plutôt qu’un « Bon alors tas de crevards, je vous laisse lâcher vos commentaires débiles sur mon tour de taille et mes seins refaits histoire de rendre mes keupines aussi superficielles que moi vertes de jalousie ».
Viennent ensuite les toujours très efficaces légendes émo qui ne veulent rien dire mais qui génèrent du com’ de fragiles à la pelle du style : « Tu crois avoir des amis et tu te rends compte que ce n’est que de l’hypocrisie… » ou « On garde le moral même si c’est pas la forme en ce moment ».
5. Partager des ‘inspirational quotes’
C’est beau morray.
Art de la plume toujours, quoi de mieux que de dispenser son immense expérience de la vie (un job d’hôtesse à temps partiel ou un semestre à la fac) à coup de citations empruntées aux trois personnages historiques qu’elles connaissent – alias Ghandi, Nelson Mandela et Carrie Bradshaw.
Dépassement de soi, ode à la beauté intérieure, éloge du spirituel… tous copiés/collés un brin new age est bon à prendre pour se dédouaner des soupçons de frivolité.
Après tout ce hipster de Platon ne faisait-il pas lui aussi l’éloge du vrai et du beau ?
[Variante : à la moindre tragédie internationale (ou quand Paul Walker meurt), le post compassionnel accompagné de son logo en vogue est tout sauf une option]
6. Donner dans le food porn décomplexé
Angles, luminosité, couleurs… chaque plat un tantinet healty doit être photographié comme s’il allait faire la couverture du prochain Vogue ou Vanity Fair.
Idem pour les visites dans ces chapelles des temps modernes que sont les Starbucks, chaque commande de mocha et macchiato doit impérativement être immortalisée.
Peu importe le degré de préparation que cela implique, le reste du monde ne peut pas rester dans les ténèbres de l’ignorance et doit connaitre la composition de ses menus.
Paradoxalement, cela n’empêche pas de servir de pancarte publicitaire pour des marques de nourriture pour poissons de compléments alimentaires en poudre…
7. Afficher une adresse Gmail dans sa bio
Au milieu d’hashtags insipides et d’emojis neuneus, la fille du moove IG lâche avec toute la fausse candeur qu’on lui connait son adresse email pour « tout contact business », genre contrat de mannequinat ou enregistrement du prochain tube de l’été.
Mouais, en dehors du fait que son profil ne contient aucune photo professionnelle, on est plus qu’en droit de subodorer qu’il s’agit surtout là d’un moyen d’hameçonner de l’organisateur de soirée ou du porteur de Rolex.
Bien évidemment, elle n’hésitera pas à rappeler régulièrement que les mecs ses comportent comme des chiens et qu’elle est fatiguée de recevoir des messages salaces.
(Soupir)