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Le tatouage : l’accessoire préféré des rappeurs [DOSSIER]

Le tatouage : l’accessoire préféré des rappeurs [DOSSIER]

Des débuts du rap à aujourd’hui, les tatouages ont toujours accompagné la scène hip-hop.

« Je n’ai aucun tatouage. Je n’ai jamais fumé de cannabis ni de cigarettes. Et je ne bois pas d’alcool. CA c’est gangster.» C’est avec ce tweet que le légendaire rappeur Ice-T expliquait ne pas avoir besoin de tatouages pour porter fièrement la casquette de bad boy. Une philosophie très peu adoptée dans le monde du hip-hop, puisque à l’heure actuelle, une majorité de rappeurs ont la peau marquée par l’encre. Pourquoi et comment le tatouage est devenu au fil des années l’accessoire préféré des rappeurs ? Décryptage avec les éclaircissements de Laura Satana, artiste tatoueuse particulièrement appréciée par le monde du rap.

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Une image de mauvais garçon assumée et revendiquée

Il est certainement le tatouage le plus célèbre du monde hip-hop, « Thug Life » encré sur les abdominaux de Tupac Shakur. Un acronyme à jamais associé au rappeur, « The Hate U Give Litlle Infants Fucks Everyone », comprenez « La haine que vous transmettez aux enfants détruit tout le monde ». Un mantra dénonçant avant tout les inégalités sociales, un combat qui tenait à coeur à l’artiste et faisait partie de son identité. Pourtant à même la peau et visible aux yeux de tous, le tatouage a toutefois une valeur intime forte. Extension physique de son identité et de sa personnalité, cet art a souvent été choisi par les rappeurs pour exprimer leur propre histoire, au même titre que leurs chansons.

Issu de la rue, le rap est né au côté des gangs présents aux Etats-Unis dès les années 70, avec notamment la présence des Bloods et des Crips de Los Angeles. Des Yakuzas japonais, au MS-13 mexicain, en passant par les Hells Angels, les membres de gangs à travers le monde sont fiers de leur affiliation à ceux-ci et aux activités illicites qui en découlent. Les membres de ces bandes organisées revendiquent leur identité de gangster en l’affichant aux yeux de tous à travers l’art du tatouage, et parfois dans leur musique. De là né le « gangsta rap » dans les années 80, animé par des rappeurs issus de groupes organisées, avec des figures emblématiques du mouvement comme N.W.A, Snoop Dogg, Ice T, Dr.Dre ou plus tard 50 Cent. Le rap se veut alors être un discours musical contestataire et revendicatif visant à dénoncer une société dominatrice et inégalitaire et prônant le statut de gangster comme étant la seule issue possible. Avec des rappeurs pour la plupart tatoués nait alors un lien fort entre l’art du rap et du tatouage.

Se fondre dans la masse de ce ghetto qu’ils se sont créé

Art décrié et souffrant d’une image négative au même titre que le rap, le tatouage est aujourd’hui choisi par les rappeurs, parfois encore, pour sa valeur anti-conventionnelle, mais surtout parce qu’il justifierait possiblement une certaine street crédibilité. Selon Laura Satana qui a tatoué entre autres Stic.man de Dead Prez, Nessbeal ou encore 25G : « Pour certain d’entre eux, tout part d’une volonté de se fondre dans la masse de ce ghetto qu’ils se sont créés, plus que de se mettre face à la société qui le rejette déjà. » A travers les tatouages le rappeur affiche aux yeux de ses pairs son vécu et donc sa légitimité à faire de la musique de « gangster ». Inspirés par l’univers des gangs américains, les tatouages de rappeurs font appels à certains symboles propres aux gangs, comme la fameuse larme tatoué sous l’oeil ou encore les icônes religieuses, très appréciées notamment par les latinos des MS13 et du Barrio 18.

Le tatouage comme prolongement de son identité

Comme le souligne le média Urban Act’ magazine, outre l’image bad boy qu’il renvoie, le tatouage est vécu comme une extension de soi et est également choisi par le rappeur pour faire fusionner dans un même corps son identité artistique et personnelle. Il n’est pas rare de voir des rappeurs se faire tatouer leur nom de scène sur le corps : De Rick Ross à Tupac, en passant par Asap Rocky, Wiz Khalifa à Soulja Boy, ou Booba et Seth Gueko, entre autres, pour la scène française… Le tatouage s’exhibe fièrement chez les rappeurs, qui choisissent de faire de leur corps un support identitaire jusqu’à tatouer le nom de leurs albums, leurs chansons, leur groupe voire même de leur label.

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Comme le rappelle le média Urban Act’ magazine, Les tatouages sont aussi choisis comme symbole d’une étape marquante par les rappeurs. Il est donc usuel de voir sur le corps de ces artistes, des hommages rendus à leurs proches ou à leurs défunts. A titre d’exemple, l’un des tatouages d’Eminem qui fait suite à l’assassinat de son ami et rappeur Proof en 2006. Waka Flocka expliquait quant à lui, lors d’une interview menée par le magazine Complex en 2012 que ses tatouages lui permettaient d’exprimer ses maux sans mots : « J’ai plusieurs tatouages de crânes. Il y a un tas de douleurs sur ma poitrine. Quand une personne voit ça, il ressent ma douleur ». Longtemps enclin à une symbolique forte, à l’expression d’émotions et de sentiments, le tatouage connaît désormais et depuis peu, une évolution frappante.

Le tatouage facial, un art traditionnel adopté par les nouveaux rappeurs

Si le tatouage facial est une pratique ancestrale datant de plusieurs milliers d’années avant JC, le tatau Polynésien en est le parfait exemple, il a aujourd’hui tendance à se démocratiser, pour ne pas dire se banaliser, à travers une vague de nouveaux rappeurs. Ces artistes pour la plupart issus de la plateforme suédoise Soundcloud, font une musique qui se caractérise notamment par un rap égocentrique et parfois mélancolique. Laura Satana nous fait par de son amertume : « J‘ai eu la chance de tatouer les membres de Dead Prez. Leurs tatouages comme leur musique ont un véritable sens, une logique. Aujourd’hui le hip-hop n’est plus au rap conscient et les tatouages de ces nouveaux rappeurs sont aussi dénué de sens que leur musique. Ces rappeurs surenchérissent sur leur look, plus que sur leurs textes ».

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Ces nouveaux artistes font l’apologie d’un look dans lequel les tatouages faciaux sont souvent de mise. Laura Satana justifie ce phénomène en affirmant que : « Le rap s’approprie aujourd’hui les codes du rock. Les cheveux colorés, les tatouages sur le visage appartenaient au punk ». 6ix9ine, Lil Pump, Trippie Redd, Lil Xan et les regrettés XXXtentacion et Lil Peep, tous sont affublés de tatouages excentriques : une fusée sous l’oeil de Lil Pump; le nombre préféré de Trippie Redd tatoué entre ses deux yeux; les différentes références au nombre 69 sur le visage de 6ix9ine, ou encore le logo du magazine Playboy sur la pommette de Lil Peep. Marginal et encore associé aux prisonniers, le tatouage facial ne s’est toujours pas débarrassé de sa connotation péjorative dans la société occidentale. Et c’est justement cet aspect anti-conventionnel qui semble séduire cette jeune vague de rappeurs, âgés d’à peine 20 ans.

Ils enchaînent les tatouages dans l’optique de se garantir une street crédibilité

Ces jeunes rappeurs biberonnés aux réseaux sociaux, semblent vouloir se différencier dans un rap game de plus en plus large et tenter de faire le buzz en marquant les esprits par des tatouages plus originaux les uns que les autres. Pour Laura Satana : « La jeune génération de rappeurs qui à peine la majorité ont encore une tête de poupon, viennent de commencer leur vie. Ils n’ont encore rien vécu et pour compenser cela, ils enchaînent les tatouages dans l’optique de se garantir une street crédibilité ». Si au même titre que l’art, la musique, ou la mode, le tatouage est un art qui évolue et connaît des symboliques et une place différente selon les époques, il est certain qu’il est bel et bien ancré, pour ne pas dire encré, dans le monde hip-hop.

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