Passée par le Brésil puis le Portugal avant d’atterrir en France, Bianca Costa est incontestablement l’une des nouvelles figures de cette scène féminine bouillonnante.
Mêlant la bossa nova à des beats trap voire électro, la rappeuse âgée de 21 ans se différencie du reste de l’industrie par une proposition artistique singulière et un univers musical aussi riche qu’hybride. Voilà qui méritait bien une petite entrevue en toute intimité dans les locaux de Booska-P.
De Rio à Paris en passant par Porto
Afin de cerner le personnage de Bianca Costa, il faut tout d’abord remonter à son enfance. Avant d’atterrir en France, c’est au Portugal et au Brésil que la jeune artiste connaît ses premiers repères : « Je suis née au Brésil. Quand j’avais cinq ans, ma mère est partie à Porto au Portugal en mode full aventure. Ma mère m’a eue très jeune. Ensuite, la vie a fait que j’ai atterri en France et on y est resté. »
Et c’est au sein même du pays des Œillets que Bianca développe son attrait pour la musique, une passion familiale. « Mon grand-père joue de la guitare et chante. Je viens d’une famille très religieuse donc c’était beaucoup dans les louanges, les gens de l’église et ce côté musical, ça chantait beaucoup à la maison. Et au Portugal, c’était la période des comédies musicales, Disney Channel etc. (rires) J’ai beaucoup suivi cette vibe là ! J’ai toujours eu ce truc de vouloir faire des groupes, chanter. J’ai toujours écrit » ajoute-t-elle.
C’est en France que j’ai développé mon attrait pour le rap
Si la musique a toujours fait partie intégrante de sa vie, son arrivée en France signe le début d’une relation passionnelle avec l’un de ses sous-genres, le rap : « C’est en France que j’ai développé mon attrait pour le rap. Je suis arrivée à l’époque de la Sexion d’Assaut. J’ai réussi à rattraper Diam’s aussi, même si c’était un peu avant que j’arrive. » Une période durant laquelle elle côtoie les membres du Way Boto, un collectif de rap dans lequel on pouvait notamment retrouver un artiste désormais bien identifié auprès des auditeurs : « Au lycée, j’ai commencé à rencontrer des gens qui étaient dans le milieu. J’étais un groupe de rap où il y avait Oboy, c’était le Way Boto. Du coup, je l’ai rencontré avant même qu’il ne se lance concrètement. J’étais souvent avec Bitsu, c’étaient les premières fois où j’allais au studio pour de vrai. »
La genèse d’une identité musicale à part
Se lancer dans le rap aujourd’hui, c’est prendre le risque d’intégrer un mouvement sollicité par la masse et de se noyer dans cette dernière en cas de non-originalité. Consciente de tous ces enjeux, Bianca a longtemps travaillé son style afin d’arriver sur le devant de la scène avec une proposition artistique bien en marge de celle de ses pairs. Toute cette longue réflexion a donné naissance à un style unique, la Bossa Trap. Un concept qu’elle définit comme étant un mélange artistique entre ses deux univers, celui relatif au Brésil avec la samba, le baile funk, la bossa nova et l’univers urbain qu’elle a façonné en France : « La Bossa Trap, c’est arrivé il y a très longtemps. J’étais en studio et on avait fait le titre « Mi Vida », un de mes premiers titres qui est sorti. On avait notamment ce truc bossa nova et on a décidé de mettre de la trap dessus parce qu’en soi c’est ce que j’écoute aussi. Et c’est resté. »
C’est bien de toucher à tout mais je sens que j’ai vraiment mon propre truc à apporter
Un mix culturel innovant qu’elle considère comme étant une véritable plus-value sur l’ensemble du rap francophone : « Il faut juste se dire qu’on a fait un vrai mélange culturel, qui n’a jamais été fait ou en tout cas pas été fait par quelqu’un qui porte ces deux cultures-là à 100 %. C’est bien de toucher à tout mais je sens que j’ai vraiment mon propre truc à apporter. »
Et en plus de faire dans l’originalité en termes de sonorités, Bianca Costa se démarque aussi dans le choix de la langue. En effet, d’origine brésilienne, comme annoncé à maintes et maintes reprises depuis le début de cet entretien, la rappeuse a fait le choix astucieux d’allier le portugais au français dans ses textes : « J’ai toujours écrit en portugais. J’ai encore une facilité musicale en portugais. La langue française est plus dure à travailler à l’écrit. Au début, c’était difficile, mais aujourd’hui je prends trop de plaisir, même dans mes toplines de passer du portugais au français. Puis aussi garder ce mélange que je trouve innovant et qui me représente assez bien. »
En progression constante
Après des débuts remarqués, Bianca Costa parvient à signer un deal avec le label Parlophone, un véritable coup de boost dans sa carrière. « Déjà, ça t’apporte beaucoup financièrement. J’avais 18 ans et franchement je n’avais ni les connaissances, ni le temps ou encore la force de me lancer dans un apprentissage pour monter mon propre label, etc. Ce que je trouve tout de même hyper intéressant et que je conseillerai toujours. C’est important d’avoir une certaine indépendance. Mais à ce moment-là, c’était trop bien d’avoir un soutien financier, même humain. Puis, quand tu signes au bon endroit, tu te sens bien » nous confie l’interprète de Falala.
L’autre fait marquant de sa carrière naissante est sa participation au documentaire Reines, pour l’amour du rap diffusé sur Canal + le 25 octobre dernier. Réalisé par Guillaume Genton, cette création a pour but de tordre le coup aux préjugés. On y retrouve cinq rappeuses issues d’horizons divers, qui ont décidé de s’unir afin de faire entendre leur voix, le temps d’enregistrer ensemble un titre inédit. Une expérience décrite comme enrichissante à tous les niveaux par Bianca : « J’ai kiffé. On a passé trois jours dans une maison, juste à faire du son. Puis finalement, c’est des belles rencontres, puisqu’on est toutes devenues potes alors qu’on n’avait rien pour se rencontrer. Je sais qu’entre certaines, il y avait même une espèce de petite rivalité qui était imposée un peu par d’autres personnes. Et, ce sont des meufs qui m’ont trop inspirée. On se tire toutes vers le haut. »
J’ai envie de sortir un nouvel EP avant l’été avec un concept spécial, un vrai univers artistique
Ainsi, quelle suite pour Bianca Costa ? Près de deux ans depuis la sortie de son premier EP Florianópolis, l’artiste laisse planer le mystère autour de son prochain disque. Un premier album ? Une marche qu’elle estime toujours trop haute à l’heure actuelle : « Je ne suis pas encore prête pour l’album. Je pense qu’il me manque plein de trucs : du temps, plus de public. Quand je m’attaquerai à l’album, je sortirai quelque chose de carré. »
En attendant l’échéance du premier album, la rappeuse a tout de même une idée du format de l’opus à venir : « Là, j’ai envie de sortir un nouvel EP avant l’été avec un concept spécial, un vrai univers artistique. »
Décrite comme l’un des talents à suivre de très près dans les prochains mois, tout laisse à croire que la jeune artiste devrait avoir sa carte à jouer dans ce rap jeu. Une chose est sûre, Bianca Costa se donnera les moyens d’atteindre ses objectifs et ne gardera en tête qu’une seule motivation : l’élévation.
