Avec la série « Ce jour où… » Booska-P revient sur ces anecdotes de plus ou moins grande importance qui ont marqué l’histoire du rap. Aujourd’hui place à ce jour où après Eminem avec 8 Miles la Three 6 Mafia en a surpris plus d’uns en 2006…
Au mois de juillet 2005 sort sur grand écran, Hustle & Flow un film indépendant écrit et réalisé par Craig Brewer et coproduit par John Singleton (Boyz N the Hood).
Le scénario conte les tribulations de DJay (Terrence Howard) un pimp de Memphis qui souhaite faire carrière dans le rap à une époque où les sons trap dirty south n’ont pas encore la côte qu’ils ont aujourd’hui.
Loin d’être réduite comme trop souvent à un simple accessoire merchandising, la musique de la bande originale est ici mise en scène tout au long du film – voir ce moment phare où DJay, Shug (Taraji P. Henson, autre révélation du film) et son équipe finalisent en live le banger It’s Hard out Here for a Pimp.
« You ain’t know »
Selon le réalisateur, l’objectif était ici d’avoir une chanson qui montrait toute la difficulté de la vie de maquereau, mais aussi « toute l’absurdité de la chose », tant le concept même a de quoi choquer – à la fin de la journée on parle tout de même d’un type qui exploite à son compte de la chair humaine.
Dans un premier temps, Brewer s’est lui-même attelé à l’écriture d’un tel morceau, avant de réaliser sitôt le premier paragraphe fini que le rendu était « wack » au possible.
Pragmatique, il fait alors appel à un groupe de légende actif sur la scène rap de Memphis depuis le début de années 90 : la Three 6 Mafia, alias Juicy J, DJ Paul, Lord Infamous, Frayser Boy et Crunchy Black.
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« Merci Georges Clooney ! »
Si en temps normal l’Oscar de la meilleure chanson revient au plus gros film en compétition (genre Céline Dion et Titanic), le 5 mars 2005 l’Académie décide à la surprise générale (à commencer par celle de Quuen Latifah en charge de dévoiler le nom du gagnant) de récompenser Hustle & Flow devant Kathleen York pour Crash et Dolly Parton pour Transamerica.
Alors que les membres du groupe étaient arrivés à la cérémonie habillés en costumes, ils se pointent chercher leur statuette sur scène en total look baggy, chaines et lunettes de soleil pour donner le discours de remerciements le plus enthousiaste de la soirée – tellement enthousiaste qu’ils en oublieront de remercier l’équipe du film.
Dans l’excitation, DJ Paul balance au passage une dédicace à Georges Clooney (?!) qu’il a rencontré juste avant la cérémonie et dont il affiche sur le corps le même tatouage que son personnage dans From Dusk till Dawn.
[Pour l’anecdote DJ Paul avait regardé le film défoncé et décida ensuite d’aller se faire tatouer la nuit même. Contrôlé sur le chemin du retour, la police découvre un gun dans sa voiture et l’embarque pour la nuit.]
Un live d’anthologie
Le groupe interprète en live It’s Hard out Here for a Pimp. C’est la première fois dans l’histoire des Oscars qu’un titre rap est joué sur scène.
[Quelques année plus tôt Eminen avait décliné l’invitation pour le titre Lose Yourself.]
Initialement, il avait été demandé à Terrence Howard de venir jouer le morceau, mais ce dernier refusa pour éviter d’associer la communauté noire à son personnage de mac’ – un choix qu’il regretta par la suite d’après Singleton.
[Howard finira par se prêter à l’exercice quelques années plus tard sur un plateau télé dans un concours de playback.]
Taraji P. Henson répond en revanche présente au refrain, tandis qu’en guise de décors les danseurs jouent aux pimps (l’un d’eux est d’ailleurs grimé comme DJay) et aux prostituées.
Si à l’évidence ce genre de distinction a permis au rap de devenir plus mainstream, cela n’empêchera pas quelques heures plus tard John Singleton, la Three 6 Mafia et leur Oscar de se faire refouler aux portes de la soirée organisée par Prince.
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