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NTM pour les nuls… [DOSSIER]

NTM pour les nuls… [DOSSIER]

Retour sur la carrière du « Nikomouk », un tandem comme on en fait plus…

« Le monde de demain quoi qu’il advienne nous appartient » promettaient-ils en 1991… Si l’histoire leur a donné raison, le sablier a depuis fait son travail. Plus de 25 ans plus tard, nous sommes doucement passés à après-demain. Aujourd’hui, voilà bientôt deux décennies que le dernier album du Suprême est sorti, autant dire qu’une large partie du public rap actuel n’était pas née à l’époque. Bien qu’accoutumés à lâcher des « N**** ta mère », rares sont donc ceux à en connaitre véritablement l’essence. Si le duo Joey Starr et Kool Shen reste dans les esprits après tant d’années, c’est qu’il a marqué l’histoire du rap français. De manière réciproque, sans l’un, l’autre n’aurait pas pu exister…

Une époque formidable

Je vous parle donc d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître, à moins d’avoir aiguisé leur curiosité, ou d’avoir grandi au contact de bienveillants anciens. Une époque sans streaming, sans internet et sans autotune. A cette période, qui pourrait paraître médiévale à certains, mais finalement pas si lointaine, faire du rap était autant une prise de risque qu’une manière de penser. Une ère où l’on pouvait encore parler de culture hip-hop sans passer pour un illuminé, où le sentiment d’appartenance à un mouvement l’emportait sur l’individualisme. Si les jeunes fous d’hier sont devenus les vieux cons d’aujourd’hui, écorchés par la nostalgie d’une époque révolue, c’est que bien des choses se sont effritées. Pas le « nikoumouk », vestige du premier âge d’or du rap français.

For real Hip-hop

Après avoir passé leur adolescence à « défoncer des trains » et à smurfer sur la tête, c’est rapidement celles des autres qu’ils vont faire tourner en osant se lancer dans la discipline la plus élitiste de la culture hip-hop : le rap. Un morceau sur Rapattitude, la première compilation du rap français sortie en 1990, un maxi nommé Le monde de demain placé dans les bacs la même année après avoir signé en maison de disques et voilà que le 93 trouve sa place sur la carte du rap hexagonal. A l’instar de groupes comme Assassin et IAM, NTM s’installe comme un pilier. Sa singularité réside alors dans un discours particulièrement explicite, reflet d’une société où la violence est aussi et surtout sociale.

Les tribuns de la plèbe

Rapidement, NTM devient un emblême de tout ce qu’il y a de plus clivant dans un domaine en pleine expansion. En 1991, à la sortie d’Authentik, leur premier album, ils possèdent leurs lots de supporters mais également de détracteurs, notamment dans les hautes sphères de la société. Nouveaux tribuns, ils envahissent les bacs et remplissent les salles. Les morceaux Authentik, C’est clair, ou encore L’argent pourrit les gens ont quelques peu jauni dans la forme mais restent totalement d’actualité sur le fond, ce qui n’est pas forcément bon signe. A une période où le Disco et la Funk laissent progressivement place à la Dance dans les charts, l’alternative était alors toute trouvée.


Qui prétend faire du rap sans prendre position ?

A contre-courant d’une société en pleine mutation entre libéralisme et mondialisation, NTM rappe pour les oubliés du système, n’hésitant pas à s’en prendre de manière particulièrement frontale aux institutions. Sorti en 1993, J’appuie sur la gachette, leur deuxième album, n’est pas celui qui a connu le plus grand succès mais problement le plus virulent et avant-gardiste de leur discographie. Si Pour un nouveau massacre sonne comme une ôde au rap hardcore tout autant qu’un rappel des valeurs originelles du hip-hop à l’heure où ce dernier commence à dangereusement s’aseptiser, Police devient de son côté un hymne contre les forces de l’ordre et leurs dérives. Enfin, Qui paiera les dégâts et Plus rien ne va sonnent comme un signal d’alarme face aux conséquences d’une ghettoïsation de plus en plus importante… Visionnaire.

Le mix parfait

Deux ans plus tard, NTM enfonce définitivement le clou avec Paris sous les bombes, on est en 1995. Mélange subtil de nostalgie de leurs jeunes années dans le milieu (Tout n’est pas si facile, Paris sous les bombes…), d’appel à la désobéissance civile (Plus jamais ça, Qu’est-ce qu’on attend ? …) et de morceaux aux thématiques plus légères (Pass Pass le oinj, La fièvre, Come again…). Egalement présent sur le projet, l’un des plus gros featurings franco-américain de l’histoire. Le remix d’Affirmative Action en collaboration avec la référence du rap new-yorkais aka Nas Escobar n’est rien d’autre qu’une démonstration de force et de technicité. Cet alliage fait de Paris Sous les bombes, le projet le plus complet de leur discographie.

Partir au sommet

Le plus complet, mais pas le plus populaire. Pour cela, il faudra attendre 1998… Si cette année-là, l’équipe de France a connu la consécration avec la Coupe du monde, NTM a connu pareille destinée avec Suprême NTM. Un ultime projet, à la portée totalement extraordinaire, qui décrochera un double disque de platine (800 000 exemplaires vendus). Si le tube Ma Benz a propulsé le groupe chez la ménagère, les morceaux Laisse pas trainer ton fils et That’s my people, bien que moins accessibles ont eux aussi connu un succès hors du commun. Moins en lumières que ceux cités précédemment, tous les autres titres du projet ou presque sont devenus des classiques auprès des initiés (Back dans les bacs, Seine Saint-Denis Style, C’est arrivé près de chez toi, Pose ton gun etc…). Une magie décuplée en tournée et rendu mythique par son côté tragique puisqu’elle marquera la fin de l’histoire d’NTM.

IV my people VS B.O.S.S

C’est là que les routes de Kool Shen et Joey Starr se séparent une première fois. Le premier donne naissance au label IV my people qui mettra en lumière des jeunes talents devenus cadors à l’image de Salif, Zoxea, Busta Flex ou encore Jeff le Nerf, Serum… Le second fonde lui B.O.S.S d’où émerge Lord Kossity, Iron Sy et bien d’autres. Le temps d’un projet, les deux labels s’opposent sur Le Clash en 2001. Suivront de nombreux albums solo mais également une réunification en 2008 pour une tournée évènement et un concert exceptionnel au Parc des princes deux ans plus tard. Voilà qui ne semble pas les avoir rassasié, cela tombe bien, nous non plus… On a désormais la réponse à la question : « Qu’est ce qu’on attend pour foutre le feu ? », les 9 et 10 mars 2018…

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