L’artiste du 91 se livre à l’occasion de la sortie de son album « Temps Additionnel ».
Après s’être fait connaître grâce à son Trap’N’Roll si particulier, Kpoint a décidé de passer la seconde. Fidèle à ses expérimentations, il a livré un nouvel album aux multiples couleurs, Temps Additionnel. Un opus aux thèmes nettement plus proches du bitume, qu’il défend actuellement sur scène, accompagnant SCH dans sa tournée à travers la France. Rencontre dans le nord de Paris, entre un café, des références footballistiques et une guitare, évidemment.
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On t’avait rencontré à l’occasion de la sortie de « Trap’N’Roll ». Qu’est-ce que tu as fait jusqu’ici ?
Tu vois DBZ ? Tu vois la salle du temps ? C’est un peu la même chose. La salle du temps, c’est là où les guerriers viennent s’entraîner. Ils en ressortent plus forts ! Donc pendant un an, on va dire que j’y étais. J’ai travaillé avec pas mal de gens différents, j’ai bossé ma musique et j’ai procédé avec une plus grande ouverture d’esprit, notamment en ce qui concerne les collaborations. J’ai travaillé, travaillé et encore travaillé pour essayer de faire évoluer mon délire.
Tu arrives avec un projet long de 19 titres, tu voulais partager toute ta palette ?
Je peux jouer sur plusieurs terrains musicaux et 13 ou 14 titres ne suffisent pas pour faire le tour. Sur 19 morceaux, je peux mettre en avant toute ma palette.
Il y a une empreinte assez latino sur « Temps Additionnel ».
Pour les sons latinos, c’est ce qui arrive dans la tendance. J’ai senti ce truc-là, je me suis dit que bientôt, ça pourrait prendre le dessus dans le rap français. Mais évidemment, à la base, ça vient d’une attirance pour ce style. Moi je suis moitié Camerounais et moitié Martiniquais, mes anciens écoutent beaucoup de Konpa, il y a une vraie ressemblance entre ce genre et les sons latino. Ce sont deux univers qui peuvent se mélanger. Et comme dans tout jusqu’à présent, j’ai essayé d’en faire un mix, mon micmac.
La salle du temps, c’est là où les guerriers de DBZ. Ils en ressortent plus forts ! Voilà où j’étais pendant un an !
Le spectre musical est d’ailleurs très large…
Sur certains titres, plusieurs univers sont mélangés. Sur d’autres, j’ai eu besoin de me fixer une ligne directrice pour ne pas trop me perdre. Jongler entre plusieurs styles, c’est ce que j’ai l’habitude de faire, mais je voulais que les auditeurs se retrouvent aussi sur des titres en particulier. Je ne mélange pas tout, partout, tout le temps. C’est ce que j’ai appris à faire avec ce projet.
Le thème de la rue est beaucoup plus présent que sur ton précédent projet.
Cette couleur n’était pas sur Trap’N’Roll, j’avais préféré garder ça pour les freestyles. Au final, c’est super important qu’elle soit là, sur cet album. C’est une manière de rappeler aux gens que je viens vraiment du rap, que je garde cette chose en moi. Temps Additionnel, c’est aussi ça.
Après ta présentation au public, tu t’affirmes.
C’est exactement ça. Si tu écoutes bien mon précédent projet, il y a de l’egotrip un peu partout, mais pas forcément de thèmes en particulier. Ici, je me suis concentré sur des sujets que je voulais vraiment aborder. C’est un peu plus ciblé, tu peux facilement classer les sons. Cela aide à identifier encore un peu plus qui je suis vraiment.
Aborder le thème de la rue, c’est une manière de rappeler aux gens que je viens vraiment du rap
Est-ce qu’il y a eu un avant et un après « Ma 6t a craqué », en feat avec Ninho ?
Clairement. L’air de guitare, les paroles de ce morceau… ce sont des choses que les gens retiennent désormais. Mon plus gros score en termes de nombres de vues, c’était sur Prisonniers du globe, aux alentours de 1,4 million. Là, on parle de 32 millions de vues donc oui il y a un avant et un après (rires). Puis Ninho, c’est un mec de la zone, on a des amis en commun… C’est ce qui fait que c’est évident. En passant au studio, il a écouté la prod’ et a dit : « c’est celle-là ». Je l’ai suivi directement. On a réussi à lier nos univers, car on s’apprécie artistiquement. C’est un artiste exposé, un grand artiste, donc forcément, c’est un plaisir de faire ce genre de feat. Puis c’est bien pour le 91.
On peut aussi compter sur Sadek et GLK…
J’ai reçu la prod’ et je me suis dit : « ça c’est pour Sadek ». Il dégage un truc particulier, il est vraiment à l’aise sur les sons brésiliens ou latinos, car c’est quelqu’un d’ouvert. En studio, il a validé le délire et ça a donné un résultat vraiment parfait. GLK, c’est vraiment une connexion humaine. C’est un mec qui fait de gros sons. Là, pour moi, on a fait un hit. Je suis vraiment heureux de ce qu’on a réussi à faire, avec un gros refrain.
Côté beatmaking, il y a également du nouveau.
Narcos, Heisenberg, Chapo, Jack Flaag qui a signé DKR… Ce sont de très bons beatmakers. Quand j’ai écouté leurs sons, je me suis demandé pourquoi on n’avait pas bossé ensemble plus tôt (rires) ! Travailler avec eux, c’est s’entourer des meilleurs, je trouve que c’est un pas important de mon année 2018.
Participer à la tournée de SCH, ça t’apporte une vraie expérience du monde de la scène
Aujourd’hui, tu assures les premières parties de SCH. Alors, les grosses scènes, c’est comment ?
C’est lourd ! C’est une vraie aventure… Le public que tu as en face de toi, il ne t’attend pas forcément. Seulement quelques personnes attendent peut-être de voir Kpoint en première partie. Ils sont venus là, ils attendent tranquillement, car ce n’est pas toi la tête d’affiche. Du coup, je prends ça comme un challenge. Participer à une tournée, c’est quelque chose que je n’avais pas fait, ça t’apporte une vraie expérience du monde de la scène. Tu en apprends beaucoup tous les jours grâce à de gros évènements. Quand les dates s’enchaînent, tu progresses beaucoup plus vite. Même au niveau de mon équipe, on fait ça sur le tas.
J’ai l’impression que les morceaux de Temps Additionnel collent d’ailleurs plus au live.
Dans Trap’N’Roll, tout était plus personnel alors qu’ici, tout a été travaillé pour que les morceaux sonnent aussi sur scène. L’Olympia, par exemple, c’était un délire. Trente minutes avant, tu n’as pas de pression, tout va bien. Mais juste avant d’arriver sur scène, tu ne parles plus et tu te poses plein de questions, sur le public notamment. Le premier son que tu fais, il est déjà décisif. T’as l’impression d’être face à un juge et son marteau… La sentence t’attend au tournant (rires) ! Dès que tu es à l’aise, le public le ressent et tout se passe bien. Dès que j’ai entendu le public reprendre Ma 6t a craqué, j’ai mangé une gifle. Cela te donne encore plus envie d’avancer dans ce sens.
La scène, ça ressemble à une forme d’accomplissement. Du coup, est-ce que tu te fixes d’autres objectifs ?
La scène, j’aime trop ça. Après, je ne me suis pas fixé d’objectifs, je fais simplement les choses pas à pas pour réussir. J’apprends pas à pas pour essayer d’arriver à mon maximum. Impossible de savoir quand, mais j’y travaille.
Dès que j’ai entendu le public reprendre Ma 6t a craqué, j’ai mangé une gifle
Autre domaine grâce auquel tu te différencies, les clips.
Les clips, c’est n’est pas forcément quelque chose de particulièrement réfléchi. Jusqu’ici par exemple, je ne suis pas allé vers des clips scénarisés. Comme je travaille en équipe, cela donne un cocktail que les gens peuvent juger différent. Mais moi, je suis dans mon truc. Je suis allé à l’étranger, mais en même temps, pas mal de monde va tourner à l’étranger. Avec Senor Django, beaucoup de gens auraient simplement misé sur l’aspect festif du morceau. Mais il n’y a pas que ça, derrière, il y a aussi des paroles. Il fallait penser à l’illustrer sans se focaliser seulement sur un délire ambiançant.
Histoire de siffler la fin de l’interview, on peut dire que le titre de ton album est clairement une référence au football ?
Je vais t’expliquer comment j’ai vu les choses. C’est bien simple, c’est comme si j’avais passé 90 minutes sur le banc et qu’à la 93e, l’entraîneur me faisait rentrer. Là, je place une tête, je marque un but et je fais gagner mon équipe. C’est ça, si tu débloques le compteur dans le temps additionnel, tu es sûr de faire gagner ton équipe.