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Earvinho, une folie bientôt payante [PORTRAIT]

Earvinho, une folie bientôt payante [PORTRAIT]

Rencontre avec l’un des rappeurs les plus productifs de 2020, entre Magic Johnson et influences venues d’Atlanta.

Crédits Photos : Antoine Ott.

D’entrée, c’est le blase du bonhomme qui avait bousculé notre rédaction : Earvinho. Référence à la star de la balle orange Magic Johnson ? Diminutif brésilien en lien avec des origines lusophones ? Finalement, le rappeur en a dévoilé la source, entre l’un des meilleurs joueurs de l’histoire de la NBA et des exploits techniques sur les terrains de foot de la région parisienne. Un sacré mélange qui colle à la manière de faire de l’artiste, qui allie une histoire bien de chez nous et un savoir-faire inspiré des US. Rendez-vous avec le rappeur dans les locaux de Because…

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La débrouille

Avant de finalement pauser ses valises dans une véritable structure, Earvinho a eu un parcours loin d’être linéaire. Ici, pas de buzz soudain et de signature dans la foulée, mais plutôt une passion pour la musique parfois mise à mal par les aléasde la rue. Néanmoins, c’est plutôt jeune qu’il a pris conscience qu’il avait de quoi faire : « Vers 15, 16 ans j’ai commencé à écrire. Ensuite, j’ai vraiment eu envie de faire quelque chose avec mes textes : les enregistrer, les faire écouter, bosser sur des visuels. Je me suis pris moi-même en main, en investissant mes propres sous. C’est la passion et l’envie de faire découvrir ma musique qui ont fait la différence. »

Mais avant que la différence se face, il a donc fallu essuyer quelques plâtres. Parmi eux, on retrouve une petite erreur, celle de ne pas tirer profit des millions de vues son featuring avec Brulux. Earvinho raconte : « Après la sortie de Golf 7R, je n’ai pas surfé sur la vague alors que j’aurais dû… J’ai préféré me concentrer sur ce dans quoi j’étais le meilleur à l’époque : la rue, les voyages, me faire plaisir… »

Après la sortie de Golf 7R, je n’ai pas surfé sur la vague alors que j’aurais dû

Rien de mieux pour comprendre ce qui n’allait pas, analyser le problème pour mieux performer désormais. « J’ai énormément de sons qui ne sont pas sortis. On se dit qu’il faut y aller crescendo… Mais à force de trop vouloir avoir une vie décente, je me suis plus concentré sur d’autres choses que la musique en elle-même, donc aujourd’hui je manque peut-être un peu d’exposition » résume le rappeur qui n’a, comme il le rappelle, « jamais attendu » que ça lui tombe dessus, préférant « faire de l’argent afin de pouvoir produire (sa) musique ». Fini donc le BTS informatique dans lequel il s’était engagé et place à un certain lifestyle… Sans jamais oublier le rap pour autant : « Au début, ça ne prend pas forcément comme tu veux. Mais le fait d’être passionné, ça te pousse à ne rien lâcher. Là, j’ai enfin rencontré les bonnes personnes et tout roule. »

Le rap US dans la tête

Faire de l’argent, assumer un certain train de vie avant de tout faire pour vivre de sa passion, le rap, voilà un état d’esprit qui colle avec ce que l’on peut voir de l’autre côté de l’Atlantique. Rendez-vous donc aux Etats-Unis avec Earvinho en guise de guide, chez qui beaucoup de sons US résonnent particulièrement : « Les sons américains, je les ressens directement. Dans la trap d’Atlanta, tu comprends direct à qui tu as à faire, ce sont des personnes qui se sont débrouillées d’abord d’elles-mêmes avant de faire de la musique. T’as des gars qui n’attendent pas d’être sauvés par le rap, ils sont déjà dans un vrai style de vie. A 18 ans, j’avais déjà un loyer sur le dos, donc j’étais donc dans un état d’esprit similaire. »

Il faut dire qu’Earvinho a de qui tenir. Son père, en plus de lui avoir donné le prénom d’une légende du basketball, l’a bercé avec quelques belles références : « Le rap US, j’ai été biberonné à ça. Mon père écoutait le Wu Tang, Method Man, Redman… C’était à l’ancienne, mon père avait un tas de CD gravés que je mettais dans mon baladeur. J’ai été à bonne école (rires). A force d’écouter, t’as forcément des vibes qui viennent. Tu commences à retranscrire ce que tu entends avec tes propres mots… Moi, ça m’est venu comme ça. »

Je préfère me sauver moi-même et ensuite profiter avec le rap. Je sais différencier la musique et la rue

« Je veux raconter ce que je vis, j’enregistre tout le temps. Je préfère me sauver moi-même et ensuite profiter avec le rap. Je sais différencier la musique et la rue. On arrive avec un délire, une image… mais toujours avec une part de vérité, c’est du partage » explique Earvinho. Vous l’aurez compris, l’artiste se situe dans la même suite logique au moment de poser en studio. D’ailleurs, lorsqu’on lui demande son feat rêvé avec un artiste outre-Atlantique, les blases fusent : « Là-bas, il y a énormément de nouveaux artistes qui font parler d’eux. Des fois, tu vas accrocher avec un rappeur, puis en découvrir d’autres… Je suis quelqu’un qui peut parfois vite se lasser alors ça permet de toujours voir ce qu’il se passe. Dans ceux que je préfère, il y a Lil Baby, car il est mélodieux et thug à la fois. Young Dolph, c’est trop aussi. Je peux citer aussi Gunna, Young Nudy, Lil Keed, Lil Gotit, Moneybagg Yo, Johnny Cinco, DaBaby, le goat Young Thug… »

Enfin l’exposition !

Mais avant une hypothétique collaboration avec un rappeur venu d’Atlanta, reste à Earvinho d’enfoncer le clou sur ses terres. Loin de se croire déjà arrivé, il arrive à prendre du recul et à mettre des mots sur les différentes étapes traversées, notamment les moments de doute : « Je ne vais pas mentir, j’ai eu des doutes. Pourquoi jeter de l’argent par les fenêtres alors que ça ne prend pas forcément ? Je voulais presque balancer tous mes sons d’un coup… Après, pourquoi gâcher tout un plan ? La musique, c’est comme le foot. T’as autant de talent dans la rue qu’en Ligue 1, mais l’exposition n’est pas la même. J’ai toujours attendu d’avoir une exposition, mais quand j’ai réussi à l’avoir, je n’ai pas su en profiter. Cela permet d’apprendre de ses erreurs. Aujourd’hui, après un morceau comme Golf 7R avec Brulux, je ferais tout pour enchaîner. »

Enchaîner, c’est bien de cela qu’il s’agit, lui qui n’a pas lésiné sur les sorties en proposant en 2020 rien de moins que les clips de Toute la night, Ya R, Chaud, ou encore Selfie tout récemment. Adepte d’une certaine folie dans ses visuels, il nous rassure en déclarant qu’il ne comptait pas s’arrêter en si bon chemin : « Je ne veux pas qu’on me catalogue dans un délire en particulier. J’ai plein de morceaux déjà enregistrés, mes gars turn-up dessus, j’ai hâte de les sortir, montrer de quoi je suis capable. Je suis allé dans des styles très différents, de la mélodie, mais aussi plein d’autres choses. »

Cela me tenait vraiment à coeur de montrer ce que je sais faire

A force de passion donc, mais aussi d’une capacité particulière à s’imprégner des principes présents dans les sons venus des quartiers abandonnés de la capitale de l’Etat de Géorgie, Earvinho a réussi à hisser son rap encore un peu plus haut. « Je crois vraiment au destin, au Karma. Je me disais que j’allais finir par tomber entre de bonnes mains. C’est ce qu’il s’est passé avec Because, qui a cru en moi. Je suis très heureux d’en être arrivé là. Cela me tenait vraiment à coeur de montrer ce que je sais faire. Je vais chercher à innover, pousser le mood encore plus à fond. On va tout faire pour être régulier. Aux states, ils sont productifs, donc on va essayer de faire la même chose, pas seulement rester dans notre coin » conclu-t-il… Cette fois, vous ne pourrez pas dire qu’il ne vous a pas prévenus.

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