Rencontre avec le duo à l’occasion de la sortie du projet « Apollo 11 ».
Au mitan des années 2000, un genre est venu bousculer les carcans en place jusqu’alors, la pop urbaine. Un terme qui paraît un peu fourre-tout au premier abord, mais qui recèle d’artistes capables de pousser la mélodie aussi bien que d’enchaîner les rimes entraînantes. Un gage de liberté pour certains qui en ont fait leur spécialité, à l’image de Dr Yaro & La Folie. Un duo de cousins découvert par personne d’autre que Naza et KeBlack et qui sort aujourd’hui son tout premier projet en bonne et due forme Apollo 11. Rencontre.
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Comment tout a commencé pour vous ?
Dr Yaro : Tout s’est passé fin 2017. Mon cousin m’a appelé alors qu’à la base, on n’a jamais chanté ensemble… Et je ne savais même pas qu’il savait chanter (rires).
La Folie : Moi à la base, je suis un chanteur de voiture moi (rires) ! En fait tout a commencé quand j’ai été invité à une session studio avec des amis. On s’est fait un kiff et j’ai essayé quelque chose. Après, pas mal de monde, dont des rappeurs, m’a dit que c’était pas mal du tout, qu’il y avait un truc à faire. Après une ou deux fois, il y a eu une prise de conscience. J’ai fini par appeler mon petit cousin pour monter un groupe. Lui, il chante depuis l’âge de neuf ans, je savais qu’il avait du talent.
Vous n’avez pas mis beaucoup de temps.
Dr Yaro : Peu de temps après cet appel, on a fait un premier son à distance. Et c’est ce premier morceau qui a été remarqué par Naza et KeBlack. C’est allé vite !
Vous avez notamment été repérés par des pros : Naza, KeBlack, Gims…
La Folie : On a aussi d’autres contacts, mais on va taire les blases (rires). C’était une semaine de fou, on n’y croyait même pas, le téléphone a pas mal sonné. On se rendait compte de quasiment rien, mais au final on a eu un problème de riches. C’était une dinguerie.
Dr Yaro : Le jour où on a eu la nouvelle pour Naza et KeBlack, c’était un premier décembre… C’était surprenant ! Faut refaire la scène, je suis là, posé tranquille et on me dit qu’ils veulent nous signer. Je chante depuis tout petit, donc forcément, ça résonne.
Ce projet, c’est déjà un premier accomplissement ?
Dr Yaro : Quoi ? Non, on préfère se dire qu’on n’a même pas commencé. Ce qu’on a fait là, c’est rien, même si c’est déjà bien de fou. La musique, c’est un milieu dur, donc il faut travailler et continuer de travailler. Par exemple, pour la signature, on nous a demandé d’enregistrer un son dans un style peu habituel : guitare voix. On n’avait pas l’habitude de ça. C’était un challenge pour voir si on était capable de bien bosser. On a pris le train, on est monté sur Paris et on l’a fait sans se poser de questions.
La Folie : On a bien fait car au final, c’est passé crème.
Il y a d’ailleurs de nombreux styles abordés sur l’opus. C’est pop au sens large du terme…
Dr Yaro : C’est très simple, on bosse sur nos morceaux sans modèles. Par exemple, pour les inspirations funk, c’est le fruit d’un délire entre nous. L’idée, pour cette mixtape, est de montrer tout ce qu’on sait faire. Donc au bout d’un moment, on est allé vers un morceau funk grâce à notre manager. En fait, on se lance des défis avec le but d’urbaniser les sons, de les moderniser. La Maison, dans la tape, à la base, c’est une valse par exemple. On est allé voir notre beatmaker pour la rendre plus trap.
Vous venez du Blanc-Mesnil (93) et de Cachan (94), c’est pourtant très rap comme terroir…
Dr Yaro : C’est vrai que plus jeune, on kiffait le rap. Au quartier à l’époque, t’allais pas voir les gens en leur chantant des mélodies, il fallait rapper, c’est tout. Puis petit à petit on est venu vers le chant. Y’a eu comme un déclic à force de construire des morceaux en mode rap avec un refrain chanté… Pourquoi ne pas chanter tout le temps ?
La Folie : Pour ma part, les mélodies ont toujours été présentes. C’est bien d’avoir sa propre identité aussi, même si j’apprécie aussi le rap.
Justement, est-ce que vous pourrez aller vers un délire plus rap à l’avenir ?
Dr Yaro : Il y a des choses qui peuvent arriver…
La Folie : (Il coupe)… Il ne faut pas tout dire (rires) !
Dr Yaro : On aime bien choquer les gens, essayer d’enregistrer toutes sortes de styles. Que ce soit sur des délires rappés ou pas, il faut qu’on essaye de nouveaux trucs.
Etre entouré de Naza et KeBlack, faire une tournée avec Gims… Cela aide à grandir plus vite ?
Dr Yaro : Si, de ouf ! Par exemple, faire des shows avec Gims, ça aide à comprendre plein de choses. Que ce soit au niveau de la préparation ou comment aborder la scène, tu apprends plus vite.
La Folie : Nos premières expériences en live, ce sont des grosses scènes.
Dr Yaro : On a fait l’Olympia lors de notre deuxième date avec Naza et on a enchaîné avec le Fuego Tour de Gims, ça fait qu’aujourd’hui, on aborde les choses avec plus de sérénité.
La Folie : On a commencé gros, donc quand tu es déjà passé par le stade de France, même si ce n’était qu’en première partie, tu restes plus tranquille par la suite.
Dr Yaro : Même au niveau des sons, on s’inspire. Avant, travailler en studio, on n’y connaissait rien.
La Folie : Maintenant il pousse même les ingénieurs du son en leur disant : « Laisse-moi faire ! » (rires).
Le thème récurrent de l’album, c’est l’amour. D’où ça vient ?
Dr Yaro : C’est facile pour nous d’écrire dessus, car tu as toujours des trucs à dire. Il y a mille choses à partager par rapport à l’amour. Dans la chanson française, ça revient très souvent, même dans la plupart des tubes, car ça parle à tout le monde. C’est autant le truc du moment, qu’un thème à l’ancienne. C’est universel, ça va de Johnny Hallyday à Jacques Brel. On vise quand même un public large et si tu ne parles que de ton quartier, tu touches peut-être moins de monde.
Comment vous abordez l’écriture, à deux ?
Dr Yaro : En général, on commence par s’inspirer d’une production. On fonctionne avec des yaourts et des mélodies avant de trouver nos textes.
La Folie : On peut même trouver une phrase au hasard et puis finalement en faire le thème principal d’un morceau. On a aussi nos délires où on se concentre pour partir vers une direction ou une autre.
Est-ce que vous vous attendiez à vivre autant de grosses expériences alors que vous avez seulement débuté en 2017 ?
La Folie : Franchement, non. Pas du tout…
Dr Yaro : Des fois, je me réveille le matin et je n’y crois pas vraiment. Je repense aux anciennes vidéos que je pouvais sortir sur YouTube. Quand ça passait de 300 à 500 vues j’étais déjà super heureux, j’avais percé (rires) ! Je faisais mes propres clips, un pote me filmait et je m’occupais du montage. Aujourd’hui on n’est pas encore arrivé là où on voudrait être, mais c’est déjà bien.
La Folie : On ne va pas se plaindre, Dieu merci. Mais on va continuer à progresser, on n’a pas fait tout ça pour s’arrêter aujourd’hui.
Dr Yaro : Si on est arrivé jusqu’ici, c’est uniquement en travaillant. Il y a un moment où on s’est fait discret, c’était pour mieux bosser en studio. Dans la mixtape, il y a 14 titres, mais on en a enregistré une centaine. On aurait pu finir il y a un an, mais on a préféré être minutieux. On a mis tout ce temps pour apprendre à mieux maîtriser notre musique. Il y en a eu des échecs, mais dans la mixtape on combine seulement le meilleur (rires).
Pour terminer, quel est votre prochain challenge ?
Dr Yaro : En plus de la sortie de la mixtape, on a une date qui est prévue pour le 25 octobre. Au GO Barbara. C’est un show qu’on prépare depuis un long moment.
La Folie : C’est notre tout premier concert en notre nom, il faut qu’on assure ça bien. Mais on a tout prévu pour que les gens ne soient pas déçus, avec des invités, des surprises… Tout va bien se passer !
Dr Yaro : Rendez-vous le 25 !